Mon ami Dahmer

Éditeur : Çà et Là

Auteur : Derf Backderf

Date de sortie : 22 février 2013

Quand on m’a parlé de Mon Ami Dahmer, j’ai d’abord vu la couverture. Hik, pas du tout le style graphique que j’affectionne, ça me rappelle un peu Charles Burns ou Daniel Clowes, dont je reconnais la qualité des œuvres sans les apprécier pour autant. Après on m’a dit que c’était à propos de la jeunesse d’un tueur en série. Là j’ai tendu l’oreille, mon cerveau faisant remonter le souvenir du terrifiant Boucher de Hanovre. Enfin on m’a expliqué que l’auteur est quelqu’un qui a connu le tueur en question. Ah. Voilà qui change. Que fait-on de souvenirs pareils lorsqu’on est auteur de BD ? Un L’adversaire dessiné ? Curiosité.

Il s’avère que ce roman graphique a subi une longue gestation avant de nous être révélé tel qu’il est aujourd’hui. Après plusieurs moutures, dont une auto-éditée et nominée aux Eisner Awards 2002 (excusez du peu), la version finale a vu le jour en 2012 aux États-Unis. Derf Backderf a fait un gros travail de documentation pour que la chronologie ne soit pas uniquement constituée de ses souvenirs, ce dont on lui sait gré.

Comme beaucoup, ce que j’ai cherché c’est une vision différente de celle qui a été donnée au moment de l’arrestation de Dahmer et de son procès. Des choses plus prosaïques et subjectives à la fois. Malgré un questionnement incessant de l’auteur, on ne trouvera pas de réponse miracle. Les quelques clés données par Backderf pour tenter d’expliquer la spirale infernale ne paraîtront pas neuves aux fan de serial killers : divorce des parents difficile, solitude intense, alcoolisme, homosexualité non acceptée… autant de facteurs que l’on peut retrouver chez des tueurs sans pouvoir considérer qu’ils mènent au meurtre. Aurait-on pu éviter cela ? La question est nulle et non avenue. Mais tandis que l’auteur s’interroge sur l’aveuglement total des adultes, moi je pense aux ados. N’est-ce pas un peu facile de dire « on était des enfants » ? Au lycée, n’est-on pas capable d’un minimum de lucidité ? Pourquoi PERSONNE n’est allé vers Dahmer ? Si les adultes ont été aveugles et sourds, pourquoi les « enfants » toujours si bruyants, se sont-ils tus également ?

En résumé : ce n’est pas « joli » à mon sens mais le dessin est parfaitement maîtrisé. Dahmer a été ce qu’il a été, et malgré quelques répétitions, Backderf en a fait une très bonne BD, éclairant sa jeunesse d’une lumière moins crue que celle des tabloïds.

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